Retour de stage
Chili - Lisa Imperatori - Génie Civil
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Valparaiso, Chili
18 novembre 2018
Partir à l’autre bout du monde pour un stage, partir sans bien savoir ce qui t’attend là-bas, mais quand même partir avec motivation et énergie, prête à travailler dur et être certaine de revenir avec un bagage d’expériences incroyable. Voilà ce qui représente pour moi un stage avec Ingénieur du Monde.
Valparaiso Chili, le 9 juin : la pluie tape fort sur les vitres de mon bus où, même avec mon bonnet et ma doudoune, j’ai l’impression d’être dans un réfrigérateur ; bien loin des températures estivales que je viens de laisser en Europe ! Je descends et, pendant que mes pieds se posent dans les 20 cm d’eau qui recouvrent toutes les routes, je me demande si je ne suis pas arrivée au mauvais endroit… je cherche le soleil, la joie, l’explosion de couleurs, les joyeuses notes de la musique latine et le parfum d’empanadas, auxquels je m’attendais en arrivant et, à ma grande surprise, je découvre que la mauvaise météo a caché tout ça, parce que, oui, ici la vie s’arrête pour un peu de pluie. Mais pas de raison de se décourager, je vais rester ici trois mois et je suis consciente que j’aurai le temps de voir cette ville sous un meilleur jour.
Le premier contact avec les gens de Valpo est bien plus que surprenant: je me retrouve à faire partie d’une famille exceptionnelle, pleine de chaleur et d’envie de partager, et qui, malgré mon espagnol approximatif, arrive à me faire sentir chez moi. En deux heures je suis adoptée en tant que sœur, fille et amie et je me rends compte que, même si la pluie peut cacher les couleurs si caractéristiques des maisons, on pourra toujours retrouver le soleil dans les yeux et les paroles des gens qui y habitent.
Mais pas de temps pour se reposer et faire la touriste car le lendemain c’est mon premier jour de travail. L’association TECHO, active dans toute l’Amérique latine, s’occupe d’aider de différentes façons les habitants des campamentos : «groupe de familles habitant dans des maisons approximatives, sans accès à l’un des services de base (eau, égouts, électricité), construites sur un terrain de manière illégale ». Volontaires et professionnels collaborent ensemble pour animer des ateliers, apporter un support technique et social, ainsi que donner des solutions de logement définitives. J’ai donc deux mois à passer, au sein d’une équipe soudée et motivée, composée d’ingénieurs, architectes et professionnels du social, en suivant différents projets de construction de maisons sociales. En effet, c’est un climat totalement détendu qui m’attend au bureau, tous ont une grande envie de changer le pays, de faire du bien et de contribuer à un développement social qui semble être limité par une politique tordue et une disparité éclatante.
Bon… je n’ai pas vraiment le temps de me mettre dans la modalité travail, car une grève des étudiants de l’université, où se trouve le bureau, nous empêche d’arriver au siège de TECHO. Je découvre que les étudiants des universités, dans tout l’état, sont en grève depuis un mois, ce qui semble être normal au Chili. Ils se battent pour les droits de la femme, pour l’accès à l’éducation, pour la santé publique et pour tous les problèmes de la société chilienne. La fréquence de ces manifestations me montre tout de suite le côté caché de ce pays qui a l’apparence d’être bien développé mais qui doit encore mener beaucoup de batailles pour devenir parfait.
La vie à Valparaiso est incroyable ! La ville vit la journée à travers ces rues grouillantes de gens, de stands colorés, d’artistes de toutes sortes, de quelques touristes, qui se posent devant les murales qui recouvrent chaque brique et chaque tôle des bâtiments, et de micro, minibus typiques, qu
i roulent à toute vitesse ; mais c’est pendant la nuit que la ville sort son côté plus extravagant, avec les jeunes qui se déversent dans la rue pour chanter et danser et qui remplissent les bars et les clubs du centre après avoir assisté au plus beau couché du soleil qu’on puisse espérer à la plage, pour finalement reprendre son cours normal et bien plus tranquille aux premières heures du matin avec le marché du poisson pas loin du port.
La vie au travail est décrite par un rythme plus détendu mais elle est loin d’être monotone. Le lien avec les familles est très fort, on discute avec elles et on apprend à les connaître ; c’est ce contact qui, pendant les longues journées sur le chantier, est stimulant à rester concentré, à analyser chaque petit détail des bâtiments en construction, à relever toute erreur ou faille dans le projet, dans le but d’obtenir un résultat presque parfait et surtout digne des attentes de la centaine de familles qui iront y habiter, et afin que tout le monde puisse être orgueilleux de la nouvelle habitation qu’il a tant espérée et tant attendue. C’est très émouvant de rencontrer des grands-parents, expliquant que dix ans auparavant ils étaient présents à la création du projet concernant des maisons qu’ils ne verront peut-être même pas se réaliser, mais qui représentent l’héritage pour leurs enfants et leurs neveux. Un héritage qui pourrait leur permettre de vivre une existence meilleure, en dehors des campamentos et de la criminalité qui y est souvent présente. Parce qu’au Chili les temps de réalisation de projets sont longs et exténuants mais grâce à l’action de TECHO et d’autres organisations, et grâce à la volonté publique, quelque chose peut changer. On se sent comme acteur d’un processus d’amélioration indispensable pour ce Pays.
Le jour de mon retour en Suisse approche et je me sens partagée. Je suis triste de quitter ce pays qui m’a tant donné et auquel j’espère aussi avoir apporté quelque chose. Je suis triste d’y laisser des personnes au cœur si grand, et également une nature qui m’en a mis plein les yeux. Mais, en même temps je suis aussi heureuse de retrouver ma maison avec la tête pleine de souvenirs inoubliables et la valise remplie de… pulls en laine d’alpaca et de délicieux avocats.
Lisa Imeratori – étudiante en Génie Civil
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